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Territorialisation de la gouvernance migratoire : Repenser l’administration des Baos

Les Bureaux d’accueil, d’orientation et de suivi (Baos) sont un outil de gouvernance territoriale des migrations qui existent depuis 1987 et placés sous la responsabilité de la Direction générale d’appui aux Sénégalais de l’extérieur (Dgase). Depuis 2018, il y a eu un nouveau tournant pour les Baos avec le programme Gouvernance, migration et développement (Gmd), qui a permis de disposer dans chaque région d’un Baos. Logeant dans les locaux des agences régionales de développement, l’administration de ces structures mérite d’être «repensée» pour plus d’inclusion et qu’on renforce leurs pouvoirs et moyens. A Louga, les acteurs souhaitent que le Baos soit érigé en service régional.

Eriger le Bureau d’accueil, d’orientation et de suivi (Baos) en service régional, c’est le souhait des acteurs à Louga. Outils de gouvernance territoriale de la migration, les Baos sont logés dans les Agences régionales de développement (Ard) qui dépendent des conseils départementaux sous la tutelle du ministère des Collectivités territoriales. Le bureau de Louga ne fait pas exception. Re­grettant que les autorités territoriales et même administratives ne soient pas trop impliquées dans la gestion de la gouvernance migratoire, Mme Nguenar Mbodj, Préfet de Louga, estime que «l’administration des Baos doit être revue pour mieux prendre en charge la question». Mieux, elle suggère une volonté politique pour renforcer les moyens d’action des Baos en «qualité de service régional» à part entière.
A Louga, depuis plus de 9 mois, elle n’a pas manqué d’engager des tournées pour mieux comprendre les enjeux de son département et les attentes de ses administrés. Toutefois, convient Mme Mbodj, pour ce qui est de la question migratoire, malgré l’importance de la contribution des immigrés de Louga dans le développement de la zone, «il n’y a pas encore eu de Conseil départemental de développement (Cdd)». Aussi, Louga ne dispose pas d’une cartographie des acteurs pour permettre une meilleure coordination des actions et éviter les doublons sur le terrain. Pour ce faire, le Baos pourrait être un bon cadre. Cependant, regrette Mme Mbodj, «la configuration du Boas fait qu’il n’est pas visible». Convaincue que c’est un bureau qui ne doit pas être logé dans une agence de développement, elle dira que «le ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’extérieur doit prendre ses responsabilités pour en faire une direction ou un service».
C’est le même son de cloche chez Mame Diarra Bousso Thiam, coordonnatrice du Réseau pour la protection des droits des migrants (Reddem). «Il faut donner plus de force, plus de responsabilités à des structures comme le Baos de Louga», s’exclame-t-elle. Pour, dit-elle, «permettre au Baos de jouer pleinement son rôle dans la gouvernance territoriale de la migration». Pour cette dernière, au regard des potentialités de Louga et de la prééminence de l’émigration et de l’impact que les immigrés ont sur la conscience collective, le Baos de Louga a beaucoup à faire. Pour cela, le plaidoyer est sans appel : «Il doit jouir d’une autonomie et d’une indépendance pour être plus efficace dans la prévention et la réponse contre l’émigration irrégulière, mais aussi et surtout promouvoir les initiatives gouvernementales au niveau territorial.»
Ces interpellations ne sont pas tombées dans l’oreille d’un sourd. Responsable du Bureau d’accueil, d’orientation et de suivi de Louga, Moustapha Kamal Kébé dit être «conscient» des enjeux, des attentes des populations. Il a informé que des démarches sont en cours au niveau central pour assurer une pérennisation des Baos.
Implanté depuis plus d’une année et demie, le Baos de Louga abat un travail fort remarquable. Au titre des fonds régionaux, le bureau a enregistré 1130 dossiers, parmi lesquels neuf cent vingt-cinq (925) ont été éligibles après dépouillement. Sur l’enveloppe de soixante millions (60 000 000) dont une partie a été mise à disposition, le Baos prévoit d’accompagner 40 projets innovants, parmi lesquels 5 projets collectifs et 35 individuels. A en croire le responsable du Baos, Kamal Kébé, les subventions sont réparties comme suit : «1 500 000 F pour les projets individuels et 2 500 000 pour les projets collectifs.»
Au regard des expériences passées où certains bénéficiaires ont utilisé l’argent pour financer leur voyage, le sieur Kébé informe qu’on a «acheté du matériel pour les demandeurs. Cela a permis aussi de faire bénéficier aux entreprises locales, mais aussi de sécuriser la subvention». En outre, dans la réalisation de la situation de référence élaborée par le Baos, il y a eu des recommandations formulées parmi lesquelles : «Le besoin d’appui d’un fonds aux migrants de retour (forcé), la pérennisation des Baos.» Par rapport aux facteurs et autres pesanteurs sociaux qui encouragent la forte propension des Lougatois à s’engager dans la voix de la migration, le Baos travaille dans la déconstruction des idées reçues et encourage davantage les jeunes à croire en eux et à investir. «Le premier problème auquelles migrants sont confrontés à leur retour, c’est l’accès à l’information. S’y ajoute qu’il y a beaucoup de structures qui interviennent dans la migration de manière éparpillée, faute de cadre de concertation. L’inves­tissement est un autre problème, surtout avec l’accès à la terre qui est un véritable casse-tête avec les collectivités territoriales», informe Kamal Kébé.

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