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Etat civil – Eradication de la non-déclaration des enfants : Les imams, chefs de village et de quartier, les acteurs-clés

Il y a la digitalisation, la sensibilisation et des séances de rattrapage comme les audiences foraines, mais le problème de la non-déclaration à l’état civil persiste toujours en dépit des moyens investis par l’Etat. Que faire ? Il y a la non-implication de certains acteurs dans la chaîne comme les chefs de quartier, de village, des imams et autres qui pourraient jouer un rôle essentiel.

Par Amadou MBODJI – Les causes de la non-déclaration de naissance des enfants sont multiples. Massamba Diouf, spécialiste de la Pro­tection des enfants au niveau de l’Unicef, expose : «C’est l’ignorance de l’utilité de l’état civil et des procédures de déclaration par certains parents.» «Les parents ne sa­vent pas pourquoi déclarer leurs enfants, comment ils doivent le faire», campe Mas­samba Diouf lors d’une présentation dans le cadre de la quatrième session ordinaire du Haut-conseil des collectivités territoriales (Hcct) présidée par Aminata Mbengue Ndiaye et dont le thème porte sur : «Enregistrement et l’exploitation des faits d’état civil, un défi majeur pour le développement territorial.»

Venu accompagner Madame Silvia Danailov, représentante-résidente de l’Unicef, auditionnée par le Hcct lors de cette rencontre, Massamba Diouf pointe du doigt «la faible implication des auxiliaires de l’état civil», à savoir «les chefs de village et les délégués de quartier», dans le processus de délivrance des actes d’état civil, alors que la loi leur donne ce droit. «De par la loi, ils sont tenus d’avoir des cahiers dans lesquels ils doivent enregistrer les naissances dans leur localité. Malheureusement, la plupart d’entre eux ignorent cette disposition de la loi ou ne disposent pas d’outils pour faire ce travail. Si ces chefs de village s’étaient impliqués dans l’enregistrement, je pense que le problème de l’éloignement et de l’enclavement ne se poserait pas», diagnostique ce spécialiste de la Protection des enfants au niveau de l’Unicef. Pour lui, la «non-prise en compte de l’imam parmi les auxiliaires d’état civil» ne facilite pas pour autant les choses. Il rappelle que ces derniers sont présents à tous les «faits d’état civil» et «pourtant ne délivrent d’attestation» et «n’ont pas de cahier de village, n’ont pas de cahier de quartier». «L’idée ici, c’est utiliser le statut de l’imam comme auxiliaire d’état civil puisqu’il y a une tradition dans nos mosquées pour délivrer des attestations de mariage, des attestations de décès», souligne-t-il.

L’autre cause est l’ignorance. Par exemple, «la sage-femme qui donne le certificat d’accouchement à la maman peut ne pas lui expliquer l’utilité de ce certificat». Il pointe une source d’équivoque : «Il arrive que les femmes croient que le certificat d’accouchement est le certificat de naissance. On a vu des femmes garder le certificat d’accouchement jusqu’au jour d’inscrire leur enfant à l’école pour le présenter. S’il y avait une bonne collaboration, une implication des acteurs de la santé dans la sensibilisation et l’orientation, je ne pense pas qu’on aurait ce problème.»

Mais, il y a des problèmes structurels qui expliqueraient cette situation. «Les causes intermédiaires, ce sont des parents sans pièces d’état civil. Au Sénégal, il y a des personnes, des adultes, des personnalités qui n’ont jamais eu d’acte de naissance, qui n’ont jamais eu de carte d’identité. J’en rigole parce que quand on a appris que le président de la Répu­blique avait donné des indemnités aux chefs de village, beaucoup d’entre eux se sont rués vers les tribunaux pour chercher des actes de naissance», affirme M. Diouf. Il soutient en outre que «l’autre cause intermédiaire reste les jugements et les audiences foraines». «Donc, ce sont des opportunités que les parents saisissent pour ne pas déclarer leurs enfants dans les délais et attendre les audiences foraines pour pouvoir leur trouver un acte», fait remarquer le spécialiste de la Protection des enfants à l’Unicef.

Par ailleurs, il y a aussi souvent les ruptures de registres, l’absence de sanctions à l’endroit de ceux qui ne déclarent pas leurs enfants, la «non-effectivité de la gratuité» de la déclaration et la «non-délivrance» de certificat d’accouchement pour les accouchements à domicile. «Il y a aussi la perception qui dit que seul le père peut déclarer son nom, alors que la loi ne dit pas ça», ajoute M. Diouf. Cela se ressent sur le taux national de déclaration des enfants. «Il faut remarquer que nous sommes dans une tendance qui stagne, qui baisse, qui n’évolue pas comme on le souhaite», souligne-t-il. Les régions de Tambacounda, Kaffrine, Diour­bel et Louga sont loin du niveau national. «Regardez bien les évolutions des taux par région : Dakar n’a progressé que de deux points entre 2014 et 2017. Tamba est passée de 46 à 61%. Kolda de 62 à 74%, presque 12 points à l’espace de trois ans. Sédhiou est passée de 54 à 76% et Kédougou de 72 à 79%. Donc, ce sont des données qui nous montrent la solution pour faire en sorte que chaque enfant qui nait dans un territoire soit déclaré. Il doit forcément y avoir cette collaboration entre la santé et l’état civil», déclare Massamba Diouf.

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