Ils seront 58 artistes originaires d’une vingtaine de pays à présenter leurs œuvres à la 15e édition de la Biennale de l’art africain contemporain à Dakar. Prévue du 16 mai au 16 juin 2024, la Biennale sera placée sous le signe de l’éveil et du sillage.
Prévue du 16 mai au 16 juin 2024, la 15e édition de la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar aura pour thème : «The Wake, l’éveil, le sillage, xall wi.» Au total, 58 artistes seront dans l’exposition internationale. Leurs noms ont été dévoilés lors d’une cérémonie au cœur de l’austère sévérité du Palais de justice du Cap Manuel. Parmi ces artistes, figurent quelques sénégalais. Il s’agit de Arebenor Bassène, Aliou Badu Diack, Dior Thiam, Mohamed Diop et Mad in pixel. Au total, indique Salimata Diop, la Directrice artistique de la Biennale, près de 640 candidatures de 100 pays ont été examinées par le comité de sélection composé de la Directrice artistique, du peintre Kalidou Kassé, du designer Ousmane Mbaye et des commissaires invitées, à savoir Dr Kara Blackmore, Marynet J. et Cindy Olohou. Cette programmation incarne «l’incroyable créativité africaine, la diversité des techniques et des médiums et des univers artistiques», souligne Salimata Diop. «Du dessin à la réalité virtuelle, en passant par le son, la sculpture ou encore la photographie, notre processus de sélection pour l’exposition internationale a été guidé par un engagement en faveur de l’inclusivité, la recherche d’un équilibre qui transcende les frontières et célèbre la riche tapisserie des voix artistiques», indique Mme Diop. Commissaire d’exposition, co-créatrice du Musée de la photo (Mupho) de Saint-Louis qu’elle a dirigé pendant une année, Salimata Diop estime que les artistes d’Afrique et de la diaspora sont à la place et dans la fonction où le monde a éperdument besoin d’eux. «Sentinelles de l’imaginaire, pionniers d’une métamorphose vitale, ils et elles creusent les lits en arborescence de nouvelles rivières, forment le limon de nouveaux fleuves, entrant dans la mer», souligne-t-elle.
Au total, ces 58 artistes de la sélection viennent de près d’une vingtaine de pays dont la France, la Tunisie, le Benin, l’Afrique du Sud, les Etats-Unis, etc. «En embrassant cette diversité dans la sélection, nous avons à cœur d’assurer un équilibre délicat entre les talents émergents et les visionnaires connus et reconnus comme Wangechi Mutu, que je suis particulièrement, fière d’avoir comme grand témoin.» En effet, la Directrice artistique a fait valoir son droit d’invitation pour convier de grands noms de l’art contemporain. «Sur les artistes que j’ai invités, j’ai essayé de créer un équilibre. Et comme on avait beaucoup de jeunes, beaucoup d’artistes très émergents, je me suis permis d’inviter des artistes plutôt reconnus et peut être moins jeunes. Je pense que c’est important qu’on puisse voir à Dakar, Wangechi Mutu ou Sokari Douglas Camp», explique Mme Diop.
Le retour du design
Absent depuis plusieurs éditions, le design fait un retour remarqué dans la Biennale. Ousmane Mbaye, commissaire de cette exposition, entend faire un état des lieux du design. «La croissance démographique du continent et les enjeux socio-économiques qui en découlent, nécessitent une transformation de cet environnement créatif en une véritable industrie. La réflexion du designer lors de cette quinzième Biennale de Dakar 2024 devra donc se concentrer sur ce défi. 95% de ce que nous consommons à grande échelle en Afrique sont importés, ce qui crée une dépendance. La Biennale, ça va être un état des lieux du design, retracer le sillage des savoir-faire, intégrer et rassembler tout ce qui est design graphique, design objet, etc.», dit-il. Comme chaque année, le Pavillon Sénégal sera le croisement des expressions artistiques du pays. Sous le commissariat de Abdoulaye Ndoye, ce pavillon exposera à côté de celui du Cap-Vert, autre pays invité. L’exposition des collectionneurs permettra à Kalidou Kassé, qui en assure le commissariat, de leur rendre un hommage mérité. D’ailleurs, l’un d’entre eux, l’ancien ministre de la Finance, Abdoulaye Diop, a fait son entrée dans le comité d’orientation. Au-delà d’une manifestation internationale, la Biennale expose et révèle la création des meilleurs artistes, souligne le Secrétaire général du ministère de la Culture, Habib Léon Ndiaye. Il sera aussi un tremplin pour les jeunes. C’est dans ce cadre que s’inscrit l’initiative d’un chantier école, une formation aux métiers de l’art en faveur des jeunes qui pourront, de ce fait, accompagner l’évènement.
Et comme les précédentes éditions, l’ancien Palais de justice du Cap Manuel accueillera l’essentiel des expositions, celle du témoin y compris. Selon les explications de Salimata Diop, au-delà de l’exposition internationale et de celle du témoin, le palais sera «un espace de vie, attractif pour un public varié ou on a envie d’être transporté par l’art, mais aussi d’échanger, de faire des rencontres, de contempler et de rêver». Espaces de vie, concerts de musique et plusieurs éléments de programmation prendront place dans ce lieu emblématiquement dédié aux arts.
L’exposition des commissaires
Trois commissaires ont été invitées à cette 15e édition de la Biennale de Dakar. Dr Kara Blackmore, Marynet J. et Cindy Olohou présenteront 10 artistes internationaux autour des questions urgentes liées à la crise écologique contemporaine. Cette crise, profondément inégalitaire, frappe de manière plus sévère, les endroits et les populations qui en sont le moins responsables. Conçue et élaborée à partir de travaux de recherche artistique et académique des artistes-chercheuses et des collectifs exposés, cette exposition offrira aux visiteurs de la Biennale un parcours sensible qui les guidera à travers les ruines de la bétonisation de nos villes, les déforestations de nos régions côtières, l’érosion, les extractions, la toxicité, les monocultures intensives écocides, les déchets high-tech dispersés dans nos décharges, annonce Salimata Diop.
Hommages à Ndoye Douts et Germaine Anta Gaye
Pour cette édition, les hommages seront articulés autour de deux grands artistes du pays. Ndoye Douts, rappelé à Dieu au mois de juin 2023, et dont les œuvres seront présentées par une exposition du Commissaire Sylvain Sankalé. Il s’agit ainsi de «revisiter l’univers de Douts et garder vivante sa mémoire», souligne la Directrice artistique qui a fait un vibrant témoignage sur l’artiste Germaine Anta Gaye. Placé sous le commissariat de Salimata Camara, l’hommage à Germaine Anta Gaye veut saluer un parcours singulier de celle qui a écrit les plus belles pages de la peinture sous-verre au Sénégal et formé de nombreux jeunes artistes.
