POLITIQUE

Reprise des cours en présentiel dans les universités : Le Saes marche dans les campus

Le Saes se sent méprisé et isolé. Le ministre de l’Enseignement supérieur et le Recteur de l’Ucad sont accusés. Le président de la République est interpellé. La réouverture des universités est souhaitée. Encore, les syndicalistes ont marché, chanté et exigé…

Par Moussa SECK – A la différence de la dernière marche, il y a plus de t-shirts. Il y a plus de monde, à la différence de la dernière manifestation. Moins de lyrisme dans la chanson, cette-fois, le ton s’est voulu plus ferme. Plus de toges, plus de pancartes ! Plus d’eau, pour se désaltérer en ce 30 novembre 2023 qui n’annonce pas décembre : il fait chaud à 11 heures. Chaud à Bambey, à Thiès et même température à Saint-Louis et Dakar ! Chaud, dans le cœur des enseignants. Plus de monde alors, pour cette autre marche du Saes, parce que tout le monde universitaire semble en avoir trop marre du «mensonge».
«Arrêtez le mensonge», le nouveau refrain ! Du reste, on reprend les anciennes tournures du pamphlet anti cours en ligne. Ils veulent enseigner, mais pas à des étudiants virtuels. «Six mois sans cours, ça suffit» : parole du lead-vocal. «Ça suffit», la troupe d’enseignants amplifie.

Ils paradent. Ils vont de faculté à faculté, traînent leur lot de doléances. A la Faculté de médecine où ils comptent faire escale et offrir un bout de discours, un groupuscule se tient. Moins touché, apparemment, par la situation de l’université. Une toge noire, trois à quatre personnes autour d’elle, des photos prises. Quelqu’un, peut-être, qui vient de soutenir. Par des applaudissements, les en­seignants, eux, soutiennent Serigne Dame Dieng (section Saes de la Faculté de médecine) qui commence son discours par se réjouir de cette forte mobilisation «pour sauver l’enseignement supérieur». «Une mobilisation, dit-il, pour exiger la reprise complète, immédiate des enseignements en présentiel.» Une mobilisation, dit-il encore, «pour dénoncer le mensonge sur ce qu’on appelle l’enseignement à distance». Et cette  mobilisation, dit-il toujours et au nom de ses collègues, parce qu’«en réalité, nous ne faisons que déposer des supports pédagogiques». Pas, peu d’interaction ! Et «évidemment, nous ne pouvons pas faire de travaux pratiques à distance. Nous ne pouvons pas faire d’activités cliniques à distance». La faculté de M. Dieng se dit ainsi prête à la reprise.

Prête à la reprise, aussi, celle de Fatou Seck Youm. Même préoccupation, même cloche, même son : même situation d’il y a quelque temps, quand la même syndicaliste disait la même chose sur la même situation et s’adressant aux mêmes autorités. Même si cette fois-ci, Fatou Seck Youm s’est prononcée devant la Fsjp, au lieu du Rectorat où elle s’était tenue la dernière fois. Dernière prise de parole, devant le Rectorat !

Si l’Etat le veut
Là-bas, David Célestin Faye n’a pas été tendre avec les deux Goliath contre qui se dresse le Saes. David, face à des Goliath absents, s’est en plus adressé à un autre arbitre, lui absent, mais qui demeure le recours ultime. Monsieur le président de la République ! «Ceux qui lui disent, dit David, que tout marche à l’Ucad, en l’occurrence le ministre de l’Enseignement supérieur et le Recteur chez lequel nous sommes, ne lui disent forcément pas la réalité des choses.» La réalité ? Elle est que «le Saes veut ce que les Sénégalais veulent. Il veut ce que tous les étudiants veulent. C’est la réouverture pure et simple de toutes les universités sans exception». La réalité ? Elle est qu’ «aujourd’hui, le Sénégal accuse un retard d’une année sur le monde entier en ce qui concerne l’enseignement». La réalité par rapport à l’enseignement à distance ? Elle est de dire que «le Saes ne s’y oppose pas unilatéralement mais qu’il il y a des préalables. Une réflexion profonde doit être menée pour ne pas sacrifier les étudiants». La réalité pour les syndicalistes ? «Nous n’accepterons pas que le ministre de l’Enseignement supérieur, que le Recteur, nous utilisent dans une tentative de sacrifice, de démantèlement de l’enseignement supérieur !» Car, poursuit M. Faye, «le Saes est un syndicat responsable, autonome et démocratique qui va participer comme il l’a toujours fait dans la marche de la Nation en disant simplement la vérité  » ! Et la vérité, se désole celui derrière qui se tiennent toges, t-shirts et pancartes : «Votre ministre nous méprise. Le Recteur nous méprise.» «Votre ministre», M. le Président. «Nous», le Saes. Ce Saes qui se dit «ouvert à des négociations, un dialogue sincère, franc avec les autorités qui ne le méprisent pas». «Nous», méprisés jusqu’à n’être pas associés à un processus qui concerne notre travail. Ainsi le mépris se traduit-il dans la bouche de David Célestin Faye : «Le Recteur n’a pas demandé aux facultés de se réunir pour donner leur avis. Il a isolé les facultés du Conseil académique. Et ce n’est pas démocratique, c’est contre l’esprit de la loi de 2015 pour laquelle nous nous sommes battus.» Cet «isolement» du Saes par l’autorité engendre une autre réalité : «Les décisions du Conseil académique ne reflètent pas la réalité.» Vérités, réalités…en voilà une autre. « Il y a des étudiants triés sur le volet qui font cours. Les étudiants qui paient font cours.» Derrière D. C. Faye, on s’indigne. Cri du chœur, cri du cœur : c’est la discrimination !

Le Saes s’est indigné, il s’est désolé. Les syndicalistes ont averti, ils renvoient chacun face à ses responsabilités. «Nous dégageons toutes les responsabilités puisque nous avons fait tous les appels nécessaires pour que les bacheliers soient pris en charge. Aujourd’hui, nous avons les bacheliers de 2023 qui attendent. Ceux de 2024 vont bientôt venir» et «on n’a pas encore réglé la question de ceux de 2022. En 2024, si on ne fait pas attention, nous aurons trois cohortes de bacheliers de première année». Attention : «La situation sera ingérable.»

Il a été prétexté une question de sécurité, pour justifier la non-réouverture de l’Ucad. Faux prétexte, selon David Célestin Faye. L’Ucad ne serait pas une terre minée. Le syndicaliste le fait constater en demandant à ses interlocuteurs de regarder tout autour. Des policiers sont aperçus pourtant. Sûrement, pour encadrer la marche faite en tenue blanche. Et, même si ce qui est prétexté est vrai, «nous pensons, nous croyons que l’Etat a les moyens de rétablir la sécurité s’il y a insécurité». S’il n’est enfin que question de conditions à réunir, «les conditions, elles peuvent être réunies si l’Etat le veut».

David Célestin Faye euphémise cependant, s’adressant à M. Macky, duquel il dit : «Vous nous avez montré que vous tenez à l’enseignement supérieur…»

Articles du même type

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Close