POLITIQUE
Atos : le choix du repreneur de l’ex-fleuron français de l’informatique finalement repoussé
Atos, lourdement endetté, a annoncé jeudi prolonger le délai « jusqu’au début de la semaine du 10 juin » pour la sélection d’une proposition de restructuration financière « privilégiée », entre celle de l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky et l’autre d’un consortium mené par Onepoint, son principal actionnaire.
Article publié le jeudi 06 juin 2024 à 07h56 et mis à jour à 10h20] Il va falloir prendre son mal en patience pour connaître le sort d’Atos. Alors que l’ex-fleuron français de l’informatique, lourdement endetté, devait choisir ce mercredi son repreneur, le délai a finalement été prolongé jusqu’au début de la semaine du 10 juin. Deux propositions de restructuration financière s’offrent au groupe : celle de l’homme d’affaires tchèque Daniel Kretinsky et l’autre d’un consortium mené par Onepoint, son principal actionnaire.
« La direction d’Atos discute avec les parties concernées afin d’améliorer certains termes de leurs propositions révisées dans le meilleur intérêt de la société. La conciliatrice requiert un délai supplémentaire afin de s’assurer du soutien maximal des créanciers financiers de la société en faveur de leur proposition privilégiée », a indiqué le groupe informatique français, dans un communiqué.
Peu après l’ouverture de la Bourse de Paris jeudi, le cours de l’action d’Atos était en hausse (+4,13%), à 1,14 euros.
Deux offres révisées
Pour rappel, l’ex-fleuron de la « French Tech » a annoncé début mai avoir besoin de 1,1 milliard d’euros de liquidités pour son activité en 2024-2025 et vouloir réduire de 3,2 milliards d’euros sa dette brute, qui avoisine les 5 milliards, pour sauvegarder son activité.
Dans le détail, parmi les deux offres « révisées » encore en lice figure celle d’EPEI, du milliardaire tchèque Daniel Kretinsky (en discussions pour racheter une partie d’Atos, avant rupture des négociations en février), allié au fonds Attestor. Et celle de Onepoint, premier actionnaire de l’entreprise (avec environ 11% du capital), dans un consortium comptant également la société d’investissement de l’homme d’affaires Walter Butler, l’entreprise Econocom, et un groupe de « certains créanciers » d’Atos.
Selon des documents officiels publiés par Atos lundi, Daniel Kretinsky et Attestor ont soumis une offre pour reprendre l’ensemble du périmètre du groupe, qui prévoit l’annulation d’environ 3,4 milliards d’euros de dette contre 4 milliards initialement. Ils se disent prêts à apporter 500 millions d’euros d’augmentation de capital et à investir jusqu’à 200 millions d’euros supplémentaires pour répondre aux besoins en liquidités de la société.
De son côté, l’offre menée par David Layani, patron de Onepoint, et les créanciers associés prévoit une restructuration de la dette à hauteur de 2,9 milliards d’euros et une augmentation de capital de 250 millions d’euros, entraînant la répartition du capital suivante: 21% pour le consortium mené par Onepoint et 9% pour les obligataires.
« Les deux propositions sont globalement conformes aux paramètres financiers fixés par la société, notamment s’agissant de la réduction de dette et des besoins de financement à court et moyen terme », a expliqué à ce sujet l’entreprise, lundi. Objectif affiché par Atos : assurer « un soutien maximal » à l’une de ces propositions.
L’État veut reprendre les activités stratégiques d’Atos
Par ailleurs, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a annoncé mardi dernier son intention de placer Worldgrid, la filiale stratégique d’Atos dédiée au « contrôle-commande » des centrales nucléaires françaises, sous le contrôle de l’État. Une annonce qui s’inscrit dans la volonté de l’État d’acquérir les activités d’Atos jugées « stratégiques », afin qu’elles ne tombent pas entre les mains d’acteurs étrangers.
Bercy a ainsi déjà exprimé son intérêt pour d’autres activités souveraines du groupe (supercalculateurs utilisés pour la dissuasion nucléaire, contrats avec l’armée française et produits de cybersécurité). L’émission d’une offre de l’État en vue d’acquérir 100% des branches « Advanced Computing », « Mission-Critical Systems » (MCS) et activités de cybersécurité, pour une valeur estimée « entre 700 millions et 1 milliard d’euros », est donc attendue pour mi-juin 2024, a indiqué lundi Atos.
Le ministère de l’Économie a aussi réalisé un prêt de 50 millions d’euros à l’entreprise et acquis une « action de préférence » lui permettant de mettre son veto à certaines opérations au niveau de Bull, la filiale qui construit ses supercalculateurs.
Atos pilier de l’organisation des JO
Atos doit aussi être un des piliers de l’organisation des Jeux olympiques (du 26 juillet au 11 août) et paralympiques (du 28 août au 8 septembre), notamment en hébergeant les données personnelles des participants et en fournissant ses services en matière de cybersécurité.
Interrogé en mars par Le Figaro pour savoir si la situation actuelle du groupe pourrait avoir des répercussions sur ces événements sportifs planétaires, le directeur général de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi), gendarme français de la sécurité informatique, s’est voulu rassurant.
« Évidemment, nous avons une vigilance particulière compte tenu des difficultés que la société a pu rencontrer, mais je n’ai aujourd’hui aucun signe d’alerte lié à la situation du groupe qui se répercuterait sur la sécurité de ce qu’ils font pour les Jeux. Nous les suivons de près pour s’assurer qu’il n’y a pas de dérives. Mais il n’y en a pas aujourd’hui », a affirmé Vincent Strubel.