POLITIQUE
Législatives : Bardella promet la suppression des impôts sur l’héritage direct jusqu’à 100.000 euros pour les familles modestes
A une semaine du premier tour des législatives anticipées, le président du RN Jordan Bardella a tenté de clarifier le programme de son parti, lors d’une grande conférence de presse ce lundi. En voici les quelques mesures fortes.
À peine commencée, la campagne des législatives entre lundi dans sa dernière semaine : poussé par les sondages mais accusé de reculer sur des mesures pourtant promises par Rassemblement national, Jordan Bardella dévoilait ce lundi matin les grands axes du programme du parti d’extrême droite.
Après quelques moments de flottement qui ont donné des munitions à ses adversaires, notamment sur la promesse d’abroger la réforme des retraites, le président du Rassemblement national, qui a déjà passé une partie de la semaine dernière à essayer d’éclaircir son programme économique et social, profitait ainsi de cette grande conférence de presse pour tenter de clarifier les positions de son parti.
Baisse de la TVA sur l’énergie
De nouveau, Jordan Bardella a rappelé la volonté de son parti de « baisser la TVA sur l’énergie » (le carburant, le fioul, l’électricité…). Il est parfaitement possible d’abaisser la TVA sur l’énergie à 5,5% dans le cadre européen actuel, assure-t-il, citant, parmi les pays ayant adopté une telle mesure selon lui, « l’Allemagne pendant la crise de l’inflation » et « la Pologne ».
Mais pas seulement, il entend également « découpler prix du gaz et électricité ». L’objectif : « simplifier et rendre plus lisible la politique énergétique du pays », assure-t-il, affirmant toutefois qu’« il ne s’agit pas de remettre en cause le marché européen, les interconnexions demeureront ».
Sur « les énergies intermittentes », comme Jordan Bardella appelle les énergies renouvelables, « je souhaite que la France redevienne un paradis énergétique », indique-t-il, disant se baser sur deux principes : « un prix de l’énergie français et que nous puissions renforcer notre parc nucléaire ».
« L’idée n’est pas d’arrêter les énergies intermittentes, mais de refaire du nucléaire un élément majeur du mixe énergétique », précise-t-il, annonçant, en cas de victoire du RN, « un moratoire sur toute nouvelle construction de chantiers éoliens ». « 25% du temps elles tournent à vide et obligent à brader l’énergie vendues à l’étranger », justifie-t-il.
Priorité également pour le parti d’extrême droite : « réaliser un audit des comptes de la nation » qui « sera chargé de faire la lumière sur les dérives budgétaires du gouvernement Macron ». « Un récent rapport du Sénat montre que le gouvernement a dissimulé certaines lignes des comptes », affirme encore Jordan Bardella.
La réforme des retraites abrogée « en principe »
Lors de sa prise de parole, Jordan Bardella a tenu à clarifier la position du RN sur la réforme des retraites d’Emmanuel Macron. Il avait, en effet, manqué de clarté devant le patronat rassemblé par le Medef la semaine passée à ce sujet. « Les Français qui ont commencé à travailler avant vingt ans et qui ont quarante annuités pourront partir dès 60 ans », a-t-il, de nouveau, assuré.
Pour les autres, une progressivité sera mise en œuvre, comme cela avait été défendu en 2022, avec un âge de départ légal de 62 ans et un nombre d’annuités allant jusqu’à 42 anuités », résume ensuite l’homme politique, sans donner plus de précisions et rappelant néanmoins que la mise en œuvre de cette mesure dépendra des résultats de l’audit budgétaire.
Et de conclure, la réforme des retraites « sera donc en principe abrogée ».
Grand plan du manger français
Concernant le volet agricole, Jordan Bardella dénonce la déraison réglementaire imposée par Bruxelles à laquelle il mettra fin si son parti accédait au pouvoir, assure-t-il. Pour soutenir les agriculteurs, nous lancerons un grand plan « manger français » en imposant « 80% de produits français servis à la cantine » et « une généralisations de l’étiquetage des produits français ».
En outre, « nous interdirons les importations des produits ne répondant pas aux standards français » et « nous mettrons en place des règles que personne ne pourra contourner, ni la grand distribution, ni les industriels », affirme-t-il encore, sans préciser quelles seront ces règles.
Suppression des impôts sur l’héritage pour les familles modestes
Mesure voulue par Eric Ciotti, comme le rappelle Jordan Bardella, la suppression des impôts sur l’héritage direct sera acté. Et ce, « pour les familles modestes et les classes moyennes jusqu’à 100.000 euros par enfant contre 15.000 euros aujourd’hui », ajoute-t-il encore.
Suppression des agences régionales de santé
En matière de santé, le RN propose la suppression des agences régionales de santé (ARS) accusée d’avoir « une vision comptable de la santé ». « Nous souhaitons que les préfets coordonnent les politiques de santé », fait ainsi valoir Jordan Bardella.
Pas d’envoi de troupes en Ukraine ni de « matériel qui pourrait frapper directement des villes russes »
« Sur la Russie, je n’entends pas remettre en cause les engagements de la France. C’est de nature à affaiblir la voix de la France sur la scène internationale et la crédibilité de notre pays à l’égard de nos partenaires européens », explique Jordan Bardella, interrogé à ce sujet.
Et de réaffirmer : « ma ligne rouge c’est l’envoie de troupes sur le sol ukrainiens. Je n’entends pas mettre en œuvre les conditions pour l’envoi de troupes », en référence aux propos d’Emmanuel Macron quelques mois plus tôt. « Deuxièmement, si je suis favorable à ce que le soutien logistique se poursuive en Ukraine, ma ligne rouge demeure sur l’envoie notamment de missiles longue portée, du matériel qui pourrait frapper directement des villes russes car cela créerait les conditions d’une cobelligérance de la France et une menace à l’égard d’une puissance nucléaire », résume-t-il, confirmant les propos tenus plus tôt dans la journée par Sébastien Chenu, député RN du Nord et figure du parti.
De même, Jordan Bardella a confirmé d’une des mesures du RN déjà annoncées concernant « les postes les plus stratégiques de l’Etat (qui) seront réservés aux citoyens français », notamment ceux liés au secteur de la sécurité, de la défense. « Réserver aux citoyens français, c’est aussi un moyen de se protéger de tentatives d’ingérence orchestrées par des Etats étrangers », explique-t-il.
Préparer le terrain
Plus tôt dans la journée, Sébastien Chenu, député RN du Nord et figure du parti, avait déjà préparé le terrain de cette conférence de presse. Au micro de la matinale de TF1, il a donné les premières actions que son parti mettrait en place en cas de victoire aux législatives.Lorsque nous arrivons, nous déclenchons une session extraordinaire du Parlement (à l’été, ndlr). Nous allons travailler sur des questions qui sont celles de l’immigration, de la sécurité et du pouvoir d’achat », a ainsi expliqué Sébastien Chenu. Le député a par ailleurs indiqué qu’il souhaitait aussi « empêcher » les personnes avec une double nationalité d’occuper « des emplois extrêmement sensibles » dont la liste sera définie « par décret ».
Interrogé sur la question délicate de la Défense en cas de cohabitation avec Emmanuel Macron, le député du Nord, candidat à sa réélection, a tracé des « lignes rouges » : l’envoi de soldats en Ukraine, l’envoi de « matériel de longue portée », permettant d’envoyer des bombes sur le territoire russe.
Attal tente de défendre le bilan de sa majorité
Du côté du camp présidentiel, le Premier ministre Gabriel Attal est, ce lundi, à Dijon pour continuer la campagne. « Le RN n’est pas prêt à gouverner. On a vu ces dernières semaines que la façade, construite pour se présenter comme le parti du pouvoir d’achat des Français, est en train de s’effondrer », a-t-il répété, plus tôt dans la journée, lors d’une interview sur Europe1/Cnews. « Chacun son identité, chacun son ADN, chacun sa méthode », a-t-il décliné, à l’égard d’Emmanuel Macron dont la majorité s’émancipe chaque jour un peu plus.
Le RN, toujours favori des intentions de vote
Pour rappel, le Rassemblement national est toujours donné favori pour ces prochaines législatives, devant le Nouveau Front populaire et le camp présidentiel. Selon un sondage exclusif Elabe pour BFMTV et La Tribune Dimanche, le RN est à 36% des intentions de vote, le Nouveau Front populaire à 27%), tandis que l’actuelle majorité pointe à la troisième place dans les intentions de vote (20%).
À partir de ce rapport de forces, Elabe a établi une projection en sièges, qui est à prendre avec distance, tant que le premier tour n’a pas eu lieu. Le Rassemblement national et ses alliés obtiendraient donc entre 250 et 280 députés, le Nouveau Front populaire et les divers gauche entre 150 et 170, et la majorité entre 90 et 110, et LR et les divers droite et centre, entre 35 et 45. Ce qui augurerait a minima d’une « solide majorité relative » pour le RN, selon Bernard Sananès, président de l’institut de sondages.
Par ailleurs, aujourd’hui, six citoyens sur dix se disent certains d’aller voter dimanche prochain. La participation pourrait même atteindre 62 à 64% selon les projections de notre partenaire. Ce serait un record pour des législatives depuis 2002.