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Arrestations de journalistes, d’activistes et interdiction de manifester : La liberté d’opinion et de manifester sont-elles menacées?
Les vagues d’arrestations notées ces derniers jours continuent de défrayer la chronique au sein de l’opinion. Les mandats de dépôt, les déferrements et les manifestations interdites préoccupent plus d’un. Ce qui fait penser à une » tentative de confiscation des libertés ». Le constat divise les spécialistes et défenseurs et se succèdent à une course effrénée. Un constat alarmant, car en moins de deux semaines, la Division spéciale de Cybersécurité ont procédé à plusieurs arrestations et convocations. Les procédures utilisées et les motifs d’arrestations restent flous. Hier mardi, le journaliste Cheikh Yérim Seck a été convoqué par la Cybersécurité pour des révélations qu’il aurait faites dans l’émission « Face à Maïmouna Ndour Faye », dont certaines sources révèlent que l’affaire est liée aux chiffres divulgués par le Premier ministre, Ousmane Sonko, lors de son point de presse tenu le jeudi 26 septembre.
Le Chroniqueur Kader Dia de la Sen TV en a pris pour son grade. Il a bénéficié mardi d’un retour de parquet. Le leader de « Gueum Sa Bopp », Bougane Guèye Dany, est convoqué ce mercredi à 9h à la Cybersécurité.
« Le régime actuel n’est pas sur le bon chemin »
A côté de ces arrestations, convocations et interdictions de sortie du territoire, des marches pacifiques se voient systématiquement interdites. Interrogé, Babacar Bâ, président du Forum du Justiciable, trouve que la question est encore prématurée. Toutefois, il reconnaît que le régime actuel n’est pas sur le bon chemin.
« Il n’y a pas de prétextes au Sénégal pour interdire les manifestations. Le droit de manifester est garanti par la Constitution. Il faut donner la possibilité aux gens de le faire. Si les interdictions deviennent systématiques ,on va vers la confiscation des libertés », a-t-il reconnu.
Selon Babacar Bâ, une convocation dans le cadre de la reddition des comptes ne pose aucune difficulté. ‘Par contre, si c’est dans le but d’intimider les gens ou les empêcher d’exprimer leurs opinions ou de mener leurs activités politiques, ça devient inacceptable dans un Etat de droit », a-t-il avancé. Non sans souligner que : « Dès lors qu’il y a reddition des comptes, forcément des gens seront convoqués et auditionnés. Et encore, ce n’est pas parce que vous êtes convoqués que vous êtes coupables. Ils sont présumés innocents ».
Maintenant, a déploré le coordonnateur du Forum du Justiciable, « ce qu’on ne saurait accepter, c’est de convoquer une personne juste pour l’empêcher d’exprimer librement ses opinions ».
Mieux, le membre de l’Office nationale de lutte contre la fraude et la corruption ( Ofnac) trouve que les délits d’opinion devraient être supprimés. « Les conventions internationales recommandent aux Etats de supprimer les délits d’opinion dans leurs législations. Au cas où la personne exprime des choses condamnables, on peut le condamner à payer des amendes et non la mettre en prison. Mettre quelqu’un en prison parce qu’il a émis une opinion, est une pratique dépassée », a-t-il souligné dans les colonnes de L’Observateur.
« On a l’impression d’assister à un règlement de comptes »
Pour sa part, Moundiaye Cissé, directeur exécutif de l’ONG 3D, est plus radical dans son analyse. » Je pense que le nouveau régime doit éviter de tomber dans les travers des injustices multiformes dont il a été victime dans le passé. Aujourd’hui, on a l’impression d’assister à un règlement de comptes. Tel est le ressenti de beaucoup de Sénégalais. Nous condamnons fermement ces arrestations tous azimuts constatées dernièrement », a-t-il déclaré.
Me Baba Diop, avocat à la Cour, semble plus modérer que les deux défenseurs des droits de l’homme. » Ce n’est pas le lieu de dire tout de suite qu’il y a une confiscation des libertés. Les arrestations sont de différentes raisons .Il y a des procédures qui sont en cours. Seules les décisions de justice qui seront rendues peuvent nous édifier sur le bien-fondé ou non de ces arrestations. Pour l’instant, c’est juste des enquêtes qui sont ouvertes. Il faut faire la part des choses », a lancé l’avocat. des droits de l’homme.