Face aux plaintes des populations sur la cherté du loyer au Sénégal, le chef de l’État a mis en place une réforme afin de revoir les prix à la baisse. Une réforme bien accueillie par les consommateurs.
Mais sa mise en œuvre est source de désaccord et de rupture de contrat entre certains bailleurs et leurs locataires. Quant aux étudiants étrangers, des bailleurs ont tenu à respecter la norme mise en place par l’État, là où d’autres sont passés outre.
Compréhensif et prêt à appliquer la réforme, le bailleur de Raph Edjo Vercel, un étudiant congolais à Dakar depuis cinq ans et résidant au quartier Médina, El Diouf, a été coopératif lorsque celui-ci lui a contacté pour discuter de la baisse du loyer. «Il était favorable et compréhensif face à cette loi. Dès lors, notre loyer a été revu comme indiqué par l’État», exprime Raph soulagé de savoir qu’il pouvait enfin économiser pour des sorties hors Dakar les week-ends.
Sans insistance de la part du locataire, certains bailleurs ont d’eux-mêmes notifié qu’il fallait payer désormais le loyer selon les nouvelles dispositions de la loi. Guylit Ndalou, étudiant congolais, locataire à Grand-Dakar, d’un air joyeux et souriant, témoigne de la gentillesse dont a fait part son bailleur M. Faye. «J’ai eu à payer comme d’habitude. C’est le bailleur qui m’a appelé afin que j’aille à l’agence retirer les 15 % du loyer».
Cependant, ces cas de figure ne s’appliquent pas partout. Certains bailleurs ne sont pas prêts à l’idée de baisser le prix de la location. Car, pour eux, l’État n’a contribué en rien dans la construction de leurs propriétés.
Nous sommes dans le quartier Ouest-Foire, où une étudiante anonyme de l’ENSUP Afrique nous explique que le bailleur a augmenté le loyer. « Il est passé de deux cent mille à deux cent cinquante mille, en moins d’un mois. Il nous a demandé de payer ce montant le mois suivant, alors que nous étions déjà au milieu du mois ou de libérer».
Pour d’autres, le bailleur laisse la responsabilité à l’agence immobilière de gérer la demande des locataires qui sollicitent la baisse du loyer. «On a appelé la dame de l’agence pour demander si c’est possible de diminuer le prix de l’appartement. Elle n’a rien voulu savoir », se désole cette étudiante congolaise qui tient à garder l’anonymat.
Il existe aussi des bailleurs réceptifs à cette loi, mais qui ne sont pas prêts à l’appliquer, en raison des revenus fixés au prix moyen. À l’exemple de Mariama Diallo rencontrée à Grand-Yoff qui se justifie : «Le coût du loyer est minime ; diminuer ne me ferait gagner aucun bénéfice. Au contraire, je perdrais.»
Pour rappel, en 2014, un décret portant sur la baisse des prix du loyer a été voté à l’Assemblée nationale pour alléger les charges des locataires. Cette loi n’avait pas eu l’impact attendu. Cependant, Le gouvernement sénégalais est revenu sur cette loi avec l’entrée en vigueur d’un décret signé le 1er mars dernier, transcrit de la manière suivante : 20 % pour les loyers inférieurs ou égaux à 300 000 F CFA, 10 % pour les loyers allant de 300 000 à 500 000 F CFA, 5 % pour les loyers de plus de 500 000 F CFA. La caution ne peut plus dépasser 2 mois de location pour les loyers inférieurs à 500 000 F CFA et est répartie comme suit : un mois de caution payable avant l’entrée en jouissance et le second étalé sur 12 mois. Le loyer n’est plus payé à l’avance, mais après consommation. Les propriétaires qui ne respecteront pas ce décret risquent des sanctions financières, voire pénales. Cette mesure sera accompagnée par la création d’une commission de régulation de loyers chargée d’arbitrer les contentieux, de traiter les questions de résiliation abusive, de hausse illicite de loyers, de non-paiement de loyer ou encore du non-respect de la loi sur la baisse, pour désengorger les tribunaux. En cas de litige entre bailleurs et locataires, il est possible de saisir le numéro vert 800 800 7777. Ladite commission de régulation ne rend aucune décision judiciaire, mais peut orienter les parties devant la juridiction compétente.